Paracha Haazinou : Dt 32, 1 – 52

Les versets de la paracha sont suivis du commentaire de Rachi

Deut.32,1 « Écoutez, cieux, je vais parler; et que la terre entende les paroles de ma bouche.

Tendez l’oreille
Aux avertissements que je vais adresser par eux à Israël. Et c’est vous qui en serez les témoins, car c’est ce que je leur ai dit : « C’est vous qui serez témoins ! » Et il en est de même pour : « … et la terre écoutera ». Et pourquoi a-t-il pris à témoins contre eux le ciel et la terre ? Mochè s’est dit : « Je ne suis que de chair et de sang, et demain je serai mort. Si [jamais] Israël devait dire : “Nous n’avons pas accepté l’alliance !”, qui viendrait les contredire ? » Voilà pourquoi il a pris à témoins contre eux le ciel et la terre, des témoins qui dureront éternellement. Et aussi parce que, s’ils le méritent, les témoins viendront leur apporter leur récompense : la vigne donnera son fruit, et la terre sa récolte. Quant au ciel, il donnera sa rosée. Et s’ils se rendent coupables, « la main des témoins sera contre eux en premier » (supra 17, 7) : « Il fermera le ciel, et il n’y aura pas de pluie, et la terre ne donnera pas sa récolte » (supra 11, 17), après quoi « vous serez détruits bientôt… » (ibid.) sous les coups portés par les idolâtres

32,2 Que mon enseignement s’épande comme la pluie, que mon discours distille comme la rosée, comme la bruyante ondée sur les plantes, et comme les gouttes pressées sur le gazon!

S’infiltrera mon enseignement comme la pluie
Le témoignage que vous porterez, c’est ce que je dis devant vous : La Tora que j’ai donnée à Israël, elle est la vie donnée au monde, tout comme la pluie est la vie donnée au monde quand le ciel distille de la rosée et de la pluie

S’infiltrera (ya‘arof)
Expression de « goutte à goutte ». De même : « … ruissellent (yir‘afoun) de graisses… » (Tehilim 65, 12), « même ses cieux distilleront (ya‘arfou) de la rosée » (infra 33, 28)

Coulera comme la rosée
Dont tous se réjouissent. Car la pluie peut présenter des inconvénients pour certaines gens, par exemple pour les voyageurs et pour ceux dont la cuve est pleine de vin (Sifri)

Comme des averses (kisse‘irim)
Dans le sens de : « vent de tempête (se‘ara) » (Tehilim 148, 8). Comme le rend le Targoum Onqelos : « comme des vents de pluie ». De même que ces vents-là fortifient la verdure et la font pousser, de même les paroles de Tora élèvent-elles ceux qui les étudient

Et comme des ondées (kirvivim)
Des gouttes de pluie. Et il me semble qu’on les appelle ainsi parce qu’elles frappent comme une flèche, comme dans : « tireur (rovè) d’arc » (Beréchith 21, 20)

Le gazon
En français médiéval : « erbediz ». Le revêtement de la terre couverte de verdure

L’herbe (éssèv)
On appelle éssèv un brin unique, ainsi que chaque espèce prise séparément

32,3 Car c’est le nom de l’Éternel que je proclame; rendez hommage à notre Dieu!

Car j’appellerai le nom de Hachem
Le mot ki s’entend ici dans le sens de « lorsque », comme dans : « quand (ki) vous viendrez vers le pays » (Wayiqra 23, 10) (Roch hachana 3a). Lorsque j’appellerai et rappellerai le nom de Hachem, vous « attribuerez de la grandeur à notre Eloqim et bénirez Son nom ». D’où l’on déduit que l’on répondait : « Béni soit le nom glorieux de son règne ! » après une bénédiction prononcée dans le sanctuaire (Ta‘anith 16b)

32,4 Lui, notre rocher, son œuvre est parfaite, toutes ses voies sont la justice même; Dieu de vérité, jamais inique, constamment équitable et droit.

Le rocher
Même s’Il est très puissant lorsqu’Il punit ceux qui transgressent Sa volonté, Il ne sévit pas avec violence mais en justice, car « parfaite est son œuvre »

Qél de fidélité
Pour payer dans le monde à venir la piété des justes, et même s’Il retarde l’échéance, Il finit par tenir parole

Et il n’y a pas d’iniquité
Aux impies aussi Il paie dans ce monde-ci le salaire de leurs bonnes actions

Il est juste et droit
Tous acceptent sur eux Sa justice, et cela est correct et droit de leur part. C’est « juste » selon ce qu’en disent les créatures, et c’est « droit » en ce qu’il est correct d’accepter Sa justice

32,5 Est-ce lui qui a condamné ses enfants? Non, c’est leur propre indignité, ô race perverse et tortueuse!

Ils se sont corrompus à son égard…
Comme le rend le Targoum Onqelos : « Leur corruption est leur œuvre, et non la Sienne »

A ses fils leur faute
Ils étaient Ses fils, et la corruption à laquelle ils ont succombé est de leur faute

A ses fils leur faute
La faute revenait à Ses fils, et non à Lui

Une génération perverse (‘iqéch)
Tortueuse et pervertie, comme dans : « Ils ont rendu tortueuse (ya‘aqchou) toute droiture » (Mikha 3, 9). Et dans le langage du Talmud : « une belette dont les dents sont recourbées et crochues (‘aqouchoth) » (‘Houlin 56a)

Et tortueuse (oufthaltol)
En français : « entortillé ». Comme un cordon (pethil) que l’on étire et que l’on enroule autour du gland

Tortueuse
Le mot oufthaltol fait partie des mots composés par redoublement, comme yeraqraq (« verdâtre ») (Wayiqra 13, 49), adamdam (« rougeâtre ») (ibid.), se‘har‘har (« palpitant ») (Tehilim 38, 11), segalgal (« sphéroïde ») (Targoum Yonathan sur I Melakhim 7, 23)

32,6 Est-ce ainsi que vous payez Dieu de retour, peuple insensé et peu sage? N’est-il donc pas ton père, ton créateur? N’est-ce pas lui qui t’a fait et qui t’a organisé?

Par ceci récompensez-vous Hachem
C’est une question ? Est-ce Lui que vous voulez chagriner, alors qu’Il a le pouvoir de vous punir et qu’Il vous a comblés de tous les bienfaits 

Peuple insensé
Qui a oublié ce qui a été fait pour lui

Et non sage
Pour comprendre les événements, qu’il est en Son pouvoir de rendre propices ou néfastes

N’est-t-il pas ton père
Qui t’a acquis (qana), [ou] qui t’a fait un nid (qan) dans les rochers et sur un terrain solide, [ou] qui a pris toutes sortes de dispositions (taqén) en ta faveur

Lui t’a fait
Une nation parmi les nations

Et t’a établi
Ensuite sur toutes sortes de fondements. C’est ainsi qu’il y a parmi vous des kohanim, parmi vous des prophètes et parmi vous des rois. [Vous êtes] une cité pourvue de tout (‘Houlin 56b)

32,7 Souviens-toi des jours antiques, médite les annales de chaque siècle; interroge ton père, il te l’apprendra, tes vieillards, ils te le diront!

Souviens-toi des jours du monde
Ce qu’Il a fait aux premiers qui L’ont irrité

Méditez les années de génération en génération
La génération d’Enoch qu’Il a submergée sous les eaux de l’océan, et celle du déluge qu’Il a noyée. Autre explication : Vous n’avez pas prêté attention au passé, « méditez les années de génération en génération »,[c’est-à-dire des générations futures], pour connaître l’avenir, car il dépend de Lui de vous combler de bienfaits et de vous faire hériter de l’ère messianique et du monde à venir

Interroge ton père
Ce sont les prophètes, que l’on appelle les « pères », comme il est écrit en parlant d’Eliyahou : « Mon père, mon père, char d’Israël… » (II Melakhim 2, 12)

Tes anciens
Ce sont les Sages

Et ils te diront
Les événements du passé

32,8 Quand le Souverain donna leurs lots aux nations, quand il sépara les enfants d’Adam, il fixa les limites des peuples d’après le nombre des enfants d’Israël.

Quand le Très-haut fit hériter
Quand le Saint béni soit-Il a fait hériter de leur part d’héritage ceux qui l’avaient irrités, Il les a submergés et les a noyés

Quand Il sépara les fils d’Adam
Lorsqu’Il dissémina la génération « de la dispersion », Il aurait pu les faire disparaître du monde, mais Il ne l’a pas fait. Mais Il a « fixé les limites des peuples » en les maintenant au lieu de les détruire

Selon le nombre des fils d’Israël
C’est selon le nombre des enfants d’Israël, qui allaient être issus de Chem, et le nombre de soixante-dix âmes des enfants d’Israël qui sont descendues en Egypte qu’Il a « fixé les limites des peuples » en soixante-dix langues

32,9 Car ce peuple est la part du Seigneur; Jacob est le lot de son héritage.

Car la portion de Hachem
Pourquoi tout cela ? Parce que « Sa portion » était englobée parmi eux et appelée à en sortir. Et quelle est Sa portion ? « Son peuple ». Et qui est Son peuple ? « Ya‘aqov, lot (‘hèvel) de Son héritage ». Il était le troisième des patriarches, porteur de triples mérites, ceux de son père, ceux de son grand-père et les siens propres, ce qui fait trois, à l’instar des trois brins constituant une « corde » (‘hèvel). C’est lui et ses fils qui seront Son héritage, et non Yichma‘el fils d’Avraham, ni ‘Essaw fils de Yits‘haq

32,10 II le rencontre dans une région déserte, dans les solitudes aux hurlements sauvages; il le protège, il veille sur lui, le garde comme la prunelle de son œil.

Il le trouvera dans un pays de désert
Il se les est trouvés, eux, fidèles dans un pays de désert lorsqu’ils ont accepté Sa Tora, Sa royauté et Son joug, ce que n’avaient pas fait Yichma‘el et les habitants du mont Sé‘ir, comme il est écrit : « Il a brillé du Sé‘ir pour eux, S’est révélé du mont Paran » (infra 33, 2)

Et dans la solitude des hurlements d’une désolation
Un pays de soif et de désolation, où hurlent chacals et autruches. Même là, ils se sont laissés attirer avec conviction et n’ont pas dit à Mochè : « Comment sortirons-nous au désert, lieu de soif et de désolation ? », dans le même sens qu’il est écrit : « … quand tu as marché derrière moi dans le désert… » (Yirmeya 2, 2)

Il l’entourera
Là Il les a entourés et les a enveloppés de nuages. Il les a entourés de drapeaux aux quatre points cardinaux. Il les a entourés dans « le dessous de la montagne » (Chemoth 19, 17) qu’il a renversé sur eux comme une coupole (Chabath 88a)

Il le construira
Là, en Tora et en intelligence

Il le formera
Contre les serpents à venin et les scorpions, ainsi que contre les idolâtres

Comme la prunelle de Son œil
C’est la partie noire de l’œil, celle d’où sort la lumière. Le Targoum Onqelos traduit le mot : « Il le trouvera » (yimtsaéhou) par : « Il a pourvu à leurs besoins », comme dans : « … et qu’on en trouve (oumatsa) pour eux » (Bamidbar 11, 22) [au sens de : « et il leur suffirait »], ou dans : « … la montagne ne nous suffira pas (yimmatsé) » (Yehochou‘a 17, 16). Quant à : « Il l’entourera » (yessovevènhou), il le rend par : « Il les a fait demeurer autour de Sa présence divine », avec la tente d’assignation au milieu et les quatre drapeaux aux quatre points cardinaux

32,11 Ainsi l’aigle veille sur son nid, plane sur ses jeunes aiglons, déploie ses ailes pour les recueillir, les porte sur ses pennes robustes.

Comme un aigle éveille son nid
Il les a conduits avec miséricorde et compassion, à l’instar de l’aigle qui est plein de pitié pour ses petits. Il n’entre pas brusquement dans son aire, mais il commence par frapper et par toquer avec ses ailes au-dessus de ses oisillons, d’arbre en arbre et de branche en branche, pour que ses aiglons se réveillent et aient la force de l’accueillir

Éveille son nid
Éveille ses petits

Plane sur ses petits
Il ne pèse pas sur eux de son poids, mais il plane, les touchant sans les toucher (Yerouchalmi ‘Haguiga 2, 1). De même le Saint béni soit-Il, « Chaqqaï, nous ne Le trouvons pas trop plein de force » (Iyov 37, 23). Lorsqu’Il est venu donner la Tora, Il ne s’est pas révélé à eux depuis un seul point cardinal, mais depuis les quatre, comme il est écrit : « Hachem est venu du Sinaï, Il a brillé du Sé‘ir pour eux, s’est révélé du mont Paran, est venu des myriades de sainteté… » (infra 33, 2), ainsi que : « Eloqa viendra de Téman… » (‘Habaqouq 3, 3), ce qui constitue le quatrième point cardinal

Il étend ses ailes
Lorsqu’il veut les transporter d’un endroit à un autre, il ne les agrippe pas entre ses pattes comme le font les autres oiseaux. Car ce que craignent les autres oiseaux, c’est l’aigle, capable de voler et de planer au-dessus d’eux. C’est pourquoi ils les transportent entre leurs pattes à cause de l’aigle. Mais l’aigle, lui, ne craint que les flèches. C’est pourquoi il les porte sur ses ailes en se disant : « Mieux vaut que ce soit moi que transperce la flèche plutôt que mes enfants ! » Le Saint béni soit-Il a agi de même : « … je vous ai portés sur des ailes d’aigles… » (Chemoth 19, 4). Quand les Egyptiens se sont lancés à leur poursuites et les ont rattrapés près de la mer, ils les ont assaillis de flèches et de projectiles de pierre. Aussitôt, « L’ange de ha-Eloqim partit […] [la colonne de nuée] vint entre le camp des Egyptiens… » (Chemoth 14, 19 et 20)

32,12 Seul, l’Éternel le dirige, et nulle puissance étrangère ne le seconde.

Hachem le conduira solitaire
Hachem les a conduits dans le désert, seul mais en sécurité

Et il n’y a pas avec lui de dieu païen
Pas un seul de tous les dieux des idolâtres n’a eu la force de manifester sa puissance et de combattre à leurs côtés. Et nos maîtres, ainsi que le Targoum Onqelos, ont expliqué ce verset comme s’appliquant à l’avenir. A mon avis, il s’agit de paroles de remontrances où sont pris à témoins le ciel et la terre, et où le cantique doit attester qu’un jour viendra où ils trahiront [Hachem] et où ils ne se souviendront plus des bontés premières qu’Il leur a prodiguées ni de ce qu’Il fera pour eux un jour. Aussi faut-il appliquer ce verset [au passé comme à l’avenir], et tout le contexte fait-il suite à : « Souviens-toi des jours du monde, méditez les années de génération en génération » (verset 7) – voilà ce qu’Il a fait [jadis], et voici ce qu’Il fera pour eux un jour. De tout cela il faut qu’ils se souviennent

32,13 II l’a fait monter victorieusement sur les hauteurs de la terre et jouir des produits des champs; l’a nourri avec le miel des rochers, avec l’huile de la roche pierreuse,

Il l’a fait chevaucher sur les hauteurs de la terre
Tout ce verset doit être compris comme le rend le Targoum Onqelos

Il l’a fait chevaucher…
Parce qu’Erets Yisrael est plus élevé que tous les autres pays

Il a mangé les récoltes de mes champs
Ces sont les fruits d’Erets Yisrael, plus prompts à bourgeonner et à mûrir que ceux de tous les autres pays

Il lui a fait sucer le miel de la roche
Quelqu’un a dit un jour à son fils, à Sikhni : « Apporte-moi des figues sèches du tonneau ! » Il y est allé et a trouvé du miel qui s’écoulait de son ouverture. [Son père] lui a dit : « Enfonce ta main à l’intérieur et tu en ramèneras des figues sèches ! » (Sifri)

Et l’huile du silex du rocher
Ce sont les olives de Gouch ‘Halav

Les hauteurs de la terre
Expression soulignant l’altitude

Mes champs (sadaï)
Vient de sadè (« champ »)

Le silex (‘halmich) du rocher
La force et la dureté du roc. Le mot est ponctué ‘halamich à l’état absolu, et ‘halmich à l’état construit

32,14 avec la crème des vaches, le lait des brebis, les gras agneaux, les béliers de Basan et les boucs, avec la mœlle exquise du froment; et tu buvais le sang vermeil du raisin.

La crème du gros bétail
Cela a eu lieu à l’époque de Chelomo, comme il est écrit : « [La nourriture de Chelomo pour un jour était de] dix bœufs engraissés, et vingt de libre pâture, et cent pièces de menu bétail… » (I Melakhim 5, 2 et 3)

Avec le suif des agneaux
Cela a eu lieu à l’époque des Dix Tribus, comme il est écrit : « … ils mangent des agneaux choisis dans le troupeau… » (‘Amos 6, 4)

Le suif des reins du froment
Cela a eu lieu à l’époque de Chelomo, comme il est écrit : « La nourriture de Chelomo pour un jour était de [trente mesures de fleur de farine]… » (I Melakhim 5, 2)

Et le sang de la grappe tu boiras comme du vin
A l’époque des Dix Tribus, « ils boivent le vin à même les amphores… » (‘Amos 6, 6)

La crème du gros bétail
C’est la crème que l’on recueille à la surface du lait

Et le lait (wa‘halév) du menu bétail
Il s’agit bien du lait. Le mot est ponctué ‘halév à l’état construit, comme dans : « dans le lait (ba‘halév) de sa mère » (Chemoth 23, 19)

Des agneaux (karim)
Ce mot signifie : « agneaux »

Et des béliers
A prendre au sens littéral

Originaires de Bachane
Ils étaient gras

Des reins (kilyoth) du froment
Des grains aussi gras que le suif des reins (kelayoth), et gros comme un rein

Et le sang de la grappe
Tu boiras du bon vin, et d’un goût remarquable

Comme du vin (‘hamèr)
Le mot ‘hamèr veut dire « vin » en araméen, mais il n’est pas ici un substantif. Il signifie : « ce qui est d’un goût exquis », en français : « vineux ». On peut encore expliquer ces deux versets par la traduction du Targoum Onqelos : « Il les a fait demeurer dans les places fortes du pays, etc. 

32,15 Yechouroun, engraissé, regimbe; tu étais trop gras, trop replet, trop bien nourri et il abandonne le Dieu qui l’a créé, et il méprise son rocher tutélaire!

Gros
Épais

Replet (kassitha)
[Le mot kassitha (ici avec un sin)] équivaut à kassith (avec un samekh), et a le même sens que dans : « … car il a couvert (khissa) sa face de graisse » (Iyov 15, 27). Comme un homme empli de graisse, dont les flancs se plissent à l’extérieur, et dont on peut dire qu’il « a fait des plis de graisse sur ses flancs » (ibid.)

Replet (kassith)
Ce mot, au mode qal, peut signifier : « être couvert », comme dans : « … et l’homme prudent est couvert (wekhossè) de honte » (Michlei 42, 16). Si le mot avait été écrit avec un daguéch dans le sin, [au pi‘él], il aurait signifié : « couvrir “d’autres” », comme dans : « … car il a couvert (khissa) sa face de graisse » (Iyov 15, 27)

Il a méprisé le rocher de son salut
Il l’a déprécié et dédaigné, comme dans : « … [il y avait des hommes qui tournaient] le dos au sanctuaire de Hachem, etc. » (Ye‘hezqèl 8, 16). Il n’existe pas pire manifestation de mépris

32,16 Ils l’irritent par des cultes étrangers; ils l’outragent par leurs abominations.

Ils Le rendent jaloux
Ils ont attisé Sa colère et Sa jalousie

Par des abominations
Par des actes abominables, comme l’homosexualité, la sorcellerie, à propos desquelles est employé le mot « abomination » (Wayiqra 18, 22 et supra 18, 12)

32,17 Ils sacrifient à des démons qui ne sont pas Dieu, à des déités qu’ils ne connaissaient point; déités nouvelles, de fraîche date, que n’avaient pas redoutées vos pères.

Qui ne sont pas des divinités
Comme le rend le Targoum Onqelos : « qui n’ont pas d’utilité ». S’ils servaient à quelque chose, ils ne provoqueraient pas, comme il le font, une jalousie redoublée

Nouveaux
Même les idolâtres n’étaient pas familiarisés avec eux. Un idolâtre, quand il les voyait, disait : « C’est une idole juive ! 

Vos pères n’ont pas frissonné (se‘aroum)
Ils n’en ont pas eu peur, et leurs cheveux (sa‘ar) ne se sont pas dressés sur leur tête, les cheveux de gens se hérissant sous l’effet de la terreur. Voilà ce qu’explique le Sifri. On peut également expliquer le mot se‘aroum dans le sens de : « des se‘irim y danseront » (Yecha’ya 13, 21), les se‘irim étant des faunes. D’où : « Vos pères n’ont jamais fait de ces “faunes”-là. 

32,18 Et le rocher qui t’engendra, tu le dédaignes, et tu oublies le Dieu qui t’a fait naître.

Tu as dédaigné (tèchi)
Tu oublieras. Nos maîtres ont expliqué que lorsqu’Il veut vous combler de bienfaits, vous L’irritez et vous affaiblissez (tachach) Sa puissance, L’empêchant ainsi de vous manifester Sa générosité

Le Qél qui t’a enfanté (mekholelèkha)
Qui t’a fait sortir de la matrice, comme dans : « [La voix de Hachem] fait enfanter (ye‘holél) les biches » (Tehilim 29, 9) ou dans : « une angoisse (‘hil) comme une femme qui accouche » (Tehilim 48, 7

32,19 A cette vue, le Seigneur s’est indigné; ainsi outragé par ses fils, par ses filles,

32,20 il a dit: Je veux leur dérober ma face, je verrai ce que sera leur avenir; car c’est une race aux voies obliques, des enfants sans loyauté.

Quelle sera leur fin
Ce qui leur arrivera à la fin

Car ils sont une génération de fourberies (tahpoukhoth)
Ils inversent (mehafkhin) Sa volonté en de la colère

En qui il n’y a pas de fidélité
Ma pédagogie n’est pas reconnaissable chez eux, car je leur ai enseigné le bon chemin et ils s’en sont écartés

Fidélité (émoun)
Même mot que dans : « Il a élevé (omén) Hadassa… » (Esther 2, 7). En français médiéval : « nurture ». Autre explication : Le mot émoun comporte une connotation de « fidélité » (èmouna), et c’est ainsi que le rend le Targoum Onqelos. Ils ont proclamé au Sinaï : « Nous ferons et nous écouterons » (Chemoth 24, 7), pour aussitôt abjurer leur promesse et fabriquer le veau d’or

32,21 Eux m’ont irrité par des dieux nuls, m’ont contristé par leurs vaines idoles; et moi je les irriterai par un peuple nul, je les contristerai par une nation indigne.

M’ont rendu jaloux
Ils ont attisé ma colère

Par [ce qui n’est] pas Qél
Par quelque chose qui n’a rien d’une divinité

Par un peuple qui n’est pas
Par des idolâtres qui n’ont pas de réputation, ainsi qu’il est écrit : « Voici le pays des Chaldéens, ce peuple qui n’était pas… » (Yecha’ya 23, 13), et de même qu’il est écrit à propos de ‘Essaw : « … Tu es très méprisable » (‘Ovadia 1, 2)

Par une nation insensée je les mettrai en colère
Il s’agit ici des renégats, ainsi qu’il est écrit : « Le renégat dit en son cœur : Il n’y a pas de Eloqim ! » (Tehilim 14, 1)

32,22 Oui, un feu s’est allumé dans ma colère, dévorant jusqu’aux profondeurs de l’abîme; il a consumé la terre et ses productions, embrasé les fondements des montagnes.

S’est allumé
Brûle

Il brûlera
En vous jusqu’aux fondations

Il dévorera la terre et sa récolte
Votre terre et sa récolte

Il embrasera
Jérusalem, dont les fondements s’appuient sur les montagnes, comme il est écrit : « Jérusalem, des montagnes l’entourent » (Tehilim 125, 2)

32,23 J’entasserai sur eux tous les malheurs; contre eux j’épuiserai mes flèches.

J’accumulerai (aspè) sur eux des maux
J’accumulerai malheur sur malheur. Le mot aspè a le même sens que dans : « Ajoutez (sefou) année sur année » (Yecha’ya 29, 1), que dans : « … afin d’ajouter (sefoth) la satiété à la soif » (supra 29, 18), ou que dans : « Ajoutez (sefou) vos ‘oloth à vos sacrifices » (Yirmeya 7, 21). Autre explication : aspè signifie : « j’épuiserai », dans le même sens que dans : « de peur que tu ne sois détruit (tissafè) par la faute de la ville » (Beréchith 19, 15)

Je consumerai mes flèches contre eux
J’userai contre eux de toutes mes flèches. Cette malédiction-là introduit [une part] de bénédiction dans la punition : Mes flèches seront consumées, mais eux ne le seront pas

32,24 Exténués par la famine, dévorés par la fièvre et des pestes meurtrières, j’exciterai contre eux la dent des carnassiers, et le venin brûlant des reptiles.

Ils seront épuisés (mezei) de famine
Le Targoum Onqelos rend cette expression par : « gonflés par la faim ». Je ne connais pas d’autre endroit dans le texte où le mot [mezei] soit employé. J’ai appris au nom de Rabi Mochè Hadarchan de Toulouse que l’expression correspond à : « rendus poilus par la faim », un homme amaigri développant des poils sur sa peau

Epuisés (mezei)
Le mot « poil », en araméen, se dit : mazia, comme dans : « il tripotait ses cheveux (bemazia) » (Meguila 18a)

Et combattus par le démon (rèchèf)
Les démons les combattront, comme il est écrit : « Les enfants de rèchèf élèveront l’envol » (Iyov 5, 7), à savoir les démons

Et une peste maligne (meriri)
Les destructions causées par un démon appelé meriri

Une peste (qètèv)
Une destruction, comme dans : « Où est ta destruction (qatavkha) , ô tombe ? » (Hoché‘a 13, 14)

Et la dent des animaux
Il est arrivé qu’une morsure de brebis soit mortelle

Le venin des rampants (zo‘halei) dans la poussière
Le venin des serpents qui rampent sur le ventre dans la poussière, comme l’eau « rampe » sur la terre. Le terme de ze‘hila désigne le parcours de l’eau sur la poussière, ainsi que tout ce qui se déplace dans la poussière avec un frottement

32,25 Au dehors, l’épée fera des victimes, au dedans, ce sera la terreur: adolescent et jeune vierge, nourrisson et vieillard.

Du dehors l’épée fera périr
Hors de la ville, l’épée fait périr des foules

Et du dedans (oumé‘hadarim)
la terreur – Lorsque l’on fuit l’épée et que l’on s’échappe, les recoins (‘hadarim) du cœur battent la chamade sous le coup de la terreur, et l’on en meurt. Autre explication de « et du dedans la terreur » : « A l’intérieur » des maisons on redoutera la peste, ainsi qu’il est écrit : « Car la mort a grimpé par nos fenêtres… » (Yirmeya 9, 20), et c’est ainsi que le rend le Targoum Onqelos. Autre explication de « du dehors (mi‘houts) l’épée fera périr » : A cause de ce qu’ils ont fait dans les rues, ainsi qu’il est écrit : « … et vous avez élevé à Bocheth autant d’autels qu’il y a de rues (‘houtsoth) à Jérusalem » (Yirmeya 11, 13)

Et du dedans (oumé‘hadarim)
la terreur – A cause de ce qu’ils ont fait dans l’intimité des « chambres » (‘hadarim), comme il est écrit : « … ce que les Anciens d’Israël font dans l’obscurité, chacun dans des “chambres” de marbre » (Ye‘hezqèl 8, 12)

32,26 J’aurais résolu de les réduire à néant, d’effacer leur souvenir de l’humanité,

J’ai dit : Je les disperserai (aféhem)
Je me suis dit : « Je vais les abandonner. » On peut expliquer le mot aféhem dans le sens de : « J’en ferai des péa », en les rejetant de chez moi comme des biens sans maître. On peut trouver la même idée à propos de ‘Ezra : « Tu leur as donné des royaumes et des peuples, tu les a répartis comme péa » (Nè‘hèmia 9, 22). C’est ainsi que le catalogue Mena‘hem. D’autres expliquent ce mot comme le fait le Targoum Onqelos : « ma colère (af) s’abattra sur eux », ce qui n’est pas correct. Car il aurait fallu que le mot fût écrit aaféhem, avec un premier alèf comme pronom personnel et un second faisant partie de la racine, comme dans : « Je te ceindrai (aazzèrkha) » (Yecha’ya 45, 5), « Je vous donnerai du courage (aamitskhem) » (Iyov 16, 5). Et le alèf situé au milieu du mot ne remplit pas du tout ce rôle. Et fait, le Targoum Onqelos s’inspire de la beraïtha enseignée dans le Sifri, laquelle divise le mot en trois : « J’ai dit : af hé hem », c’est-à-dire : « J’ai dit dans ma “colère” (af) que je les traiterai comme s’ils n’étaient rien, de sorte que ceux qui les verront se demanderont où (ayé) ils sont (hem) »

32,27 Si je ne craignais le dire insultant de l’ennemi et l’aveuglement de leurs persécuteurs, qui s’écrieraient: « C’est notre puissance qui triomphe, ce n’est pas l’Éternel qui en est la cause. »

Si je ne craignais la colère de l’ennemi
Si la colère de l’ennemi ne s’était pas accumulée contre eux pour les détruire, et si, les ayant vaincus et détruits, il n’en attribuait pas la gloire à lui seul et à ses divinités, et non à moi. C’est ce que veut dire : « de peur que leurs adversaires ne fassent le païen », c’est-à-dire ne faussent l’événement en attribuant sa puissance à une idolâtrie qui n’en possède aucune, et « qu’ils ne disent : notre main est élevée, etc. 

32,28 Car c’est une race aux idées fausses; ils sont dépourvus d’intelligence.

Car
Cette nation-là

Ils sont ceux qui ont perdu le conseil
Car s’ils étaient des Sages, ils comprendraient « comment un seul poursuivra mille, etc. »

32,29 S’ils étaient sages, ils y réfléchiraient; ils seraient frappés de ce qui finit par leur arriver:

Ils auraient considéré leur fin
Ils s’appliqueraient à comprendre le dessein [poursuivi par les] punitions infligées à Israël

32,30  « Comment un seul homme pourrait-il en poursuivre mille, deux, mettre en fuite une myriade, si leur protecteur ne les eût vendus, si l’Éternel ne les eût livrés?

Comment un seul poursuivra
[Un seul] d’entre eux [poursuivra] mille en Israël

Si leur rocher ne les avait vendus
Ne les avait vendus et livrés en nos mains. En français : « délivrer »

32,31 Car leur protecteur ne ressemble point au nôtre, et nos ennemis sont une race à part.

Car [il n’est] pas comme notre rocher (tsourénou)
Tout cela, les ennemis auraient dû le comprendre : que c’est Hachem qui les a livrés et que ce n’est pas à eux-mêmes et à leurs dieux qu’ils doivent leur victoire. Jusqu’à présent, leurs dieux étaient impuissants contre « notre rocher », car « notre rocher n’est pas comme le leur ». Le mot tsour employé dans le texte signifie toujours : « rocher »

Et nos ennemis [sont] juges
Et maintenant nos ennemis nous jugent, car « notre rocher » nous a vendus à eux

32,32 De fait, leur vigne tient de la vigne de Sodome, et leur terroir, des campagnes de Gomorrhe; leurs raisins sont des baies vénéneuses, ce sont des grappes amères que les leurs.

Car leur vigne est de la vigne de Sedom
Ces mots font suite à ce qui est écrit plus haut : « J’ai dit : Je les disperserai, j’abolirai de l’homme leur mémoire » (verset 26). Car leurs actions sont actions de Sedom et de ‘Amora

Les terroirs (chadmoth)
Les terres agricoles, comme dans : « … et les terres agricoles (ouchedémoth) ne produiront pas de nourriture (‘Habaqouq 3, 17), ou dans : « … sur les terres agricoles (bechadmoth) du Qidron » (II Melakhim 23, 4)

Des raisins vénéneux
De l’herbe amère

Leurs grappes sont amères pour eux
Ils méritent de boire une boisson amère, à tels actes telles punitions. C’est ainsi que le rend le Targoum Onqelos : « Leurs actions seront payées selon leur amertume »

32,33 Leur vin, c’est la bave des serpents, c’est le poison meurtrier des vipères! »

Leur vin est un venin de monstres
Comme le rend le Targoum Onqelos : « La coupe de leurs punitions possède l’amertume des serpents. 

Et un poison d’aspics
Leur coupe, qui est cruelle à celui qui est mordu. Un ennemi cruel viendra exercer sur eux le châtiment

32,34 Certes, ceci est mon secret; il est scellé dans mes archives.

Cela n’est-il pas caché avec moi
Comme le rend le Targoum Onqelos. Ils s’imaginent que j’ai oublié leurs actions, mais elles sont toutes « conservées et gardées devant moi »

Cela n’est-il pas
Le fruit de leur vigne et la récolte de leur champ ne sont-ils pas scellés auprès de moi 

32,35 A moi la vindicte et les représailles, vienne l’heure où leur pied doit glisser; car il approche, le jour de leur catastrophe, et l’avenir accourt sur eux!

A moi la vengeance et la rétribution (wechilém)
Auprès de moi est apprêtée et préparée la punition, la « vengeance » qui les « rétribuera » selon leurs actes. La vengeance leur paiera ce qui leur est dû. Certains expliquent le mot wechilém comme étant un substantif, comme s’il était écrit : wechalom, tout comme dans : « … et la parole (wehaddibér) n’est pas en eux » (Yirmeya 5, 13), comme s’il y avait : wehadibour. Et quand vais-je les payer ?

… Au temps où trébuchera leur pied
Lorsque sera épuisé le mérite de leurs pères sur lequel ils s’appuient

Car proche est le jour de leur calamité
Quand je voudrai leur appliquer un jour de calamité, il sera proche, préparé devant moi pour être infligé par de nombreux messagers

Et le futur se hâte pour eux
Leur futur les atteindra bientôt

Se hâte (we‘hach)
Comme dans : « Qu’Il se dépêche, qu’Il se hâte (ya‘hicha) d’accomplir Son œuvre » (Yecha’ya 5, 19). Ici prennent fin les paroles de remontrances que leur a adressées Mochè afin que ce cantique serve de témoin quand s’abattra sur eux la punition, [comme s’il leur avait dit] : « Il faut qu’ils sachent que je les avais avertis de longue date. » A partir de maintenant, il va leur adresser des paroles de consolation telles qu’elles les atteindront lorsque prendra fin la punition, ainsi qu’il l’a dit plus haut : « Ce sera, lorsque viendront sur toi toutes ces choses, la bénédiction et la malédiction […] reviendra Hachem, ton Eloqim, de ta captivité, etc. » (supra 30, 1 à 3)

32,36 Oui, l’Éternel prendra parti pour son peuple, pour ses serviteurs il redeviendra propice, lorsqu’il les verra à bout de forces, sans appui et sans ressources.

Quand Hachem jugera Son peuple
« Quand » Il prononcera contre eux ces punitions-là telles qu’elles ont été détaillées, comme dans : « Quand (ki) Il se sert d’eux pour juger les peuples » (Iyov 36, 31). Le mot ki ne s’entend pas ici dans le sens de « car », destiné à justifier ce qui précède, mais [dans celui de « lorsque »], pour marquer le début d’un discours, comme dans : « quand (ki) vous viendrez vers le pays » (Wayiqra 23, 10) (Roch hachana 3a). Quand se seront abattus sur vous ces jugements-là, le Saint béni soit-Il se ravisera en ce qui concerne Ses serviteurs et Il les reprendra en pitié

Il se ravisera (yithnè‘ham)
Le mot signifie : « changer son dessein », en bien ou en mal

Quand Il verra que la main s’en est allée
Quand Il verra que la main de l’ennemi va en s’appesantissant sur eux toujours plus, et qu’il n’y a plus en eux ‘atsour ni ‘azouv

Lié (‘atsour) 
Secourus par un chef qui puisse les arrêter (ya‘atsor)

Abandonné (‘azouv)
Par un ‘ozèv. Le mot ‘otsér s’applique à un chef qui « arrête » (‘otsér) ses troupes afin qu’elles ne se dispersent pas au moment où elles partent combattre l’ennemi. En français : « maintenu »

Lié (‘atsour)
C’est celui qui est sauvé grâce à « l’arrêt » imposé par le chef

Abandonné (‘azouv) 
Affermi, comme dans : « Ils ont aidé (waya‘azvou) Jérusalem jusqu’au large mur » (Nè‘hèmia 3, 8), ou dans : « Comment a-t-elle pu ne pas être fortifiée (‘ouzzeva), la ville glorieuse ? » (Yirmeya 49, 25)

32,37 Alors il dira: « Où sont leurs dieux, ces rocs tutélaires, objets de leur confiance;

Il dira
Le Saint béni soit-Il, à leur sujet

Où sont leurs dieux
Les idoles qu’ils ont adorées

Le rocher en qui ils se confiaient
Le rocher sous lequel ils se protégeaient du soleil et du froid, c’est-à-dire ce en quoi ils avaient confiance pour les protéger du mal

32,38 qui consomment la graisse de leurs victimes, s’abreuvent du vin de leurs libations? Qu’ils se lèvent pour vous secourir! Qu’ils soient pour vous une sauvegarde!

Eux qui mangeront le suif de leurs sacrifices
Ce sont ces dieux-là qui les mangeaient, car ils leur présentaient [les sacrifices], et ils buvaient « le vin de leurs nessakhim »

Qu’ils soient sur vous un abri
Que ce rocher soit pour vous un havre et un abri

32,39 Reconnaissez maintenant que c’est moi, qui suis Dieu, moi seul, et nul dieu à côté de moi! Que seul je fais mourir et vivre, je blesse et je guéris, et qu’on ne peut rien soustraire à ma puissance.

Voyez maintenant
Comprenez, tant par les châtiments que je vous ai infligés sans que personne se porte à votre secours, que par le salut que je vous accorderai sans que personne ne m’en empêche

Que moi
Que je suis là pour abaisser et que je suis là pour relever

Et il n’y a pas de dieu à côté de moi
Qui se dresse contre moi pour m’empêcher [d’agir]

A côté de moi
A mon exemple et comme moi

Et il n’y a pas de sauveteur de ma main
Ceux qui pèchent contre moi

32,40 Oui, j’en lève la main au ciel, j’en atteste mon éternelle existence

Car je lèverai vers le ciel ma main
Car dans ma colère, je lèverai ma main vers moi-même à titre de serment

Je dis : Je suis vivant
C’est une formule de serment : « Je jure par ma vie [éternelle] ! 

32,41Quand j’aiguiserai l’éclair de mon glaive, quand ma main s’armera du châtiment, je prendrai ma revanche sur mes adversaires, je paierai de retour mes ennemis.

Lorsque j’aiguise l’éclair (beraq) de mon épée
Lorsque j’affûte l’éclat de mon épée, comme dans : « … afin qu’il jette un éclair (baraq) » (Ye‘hezqèl 21, 15). En français médiéval : « plandur »

Et que ma main saisit le jugement
Pour me départir de la mesure de miséricorde envers mes ennemis qui vous ont fait du mal. Ma colère était légère, mais eux ils ont contribué au mal. Autre explication : « Ma main saisira » la mesure de justice pour la tenir fermement et exercer une vengeance

Je rendrai la vengeance…
Nos maîtres ont enseigné dans la aggada, à partir de la façon dont s’exprime le texte : « … et que ma main saisisse le jugement », que la manière d’agir du Saint béni soit-Il ne ressemble pas à celle des humains. Lorsqu’un homme tire une flèche, il ne peut plus la retenir, tandis que le Saint béni soit-Il, lorsqu’Il a tiré Ses flèches, a la possibilité de les retenir, comme s’Il les avait conservées en main. Car l’éclair, c’est Sa flèche, comme il est écrit ici : « … l’éclair de mon épée et que ma main saisisse le jugement (michpat) », et la justice (michpat) c’est le châtiment. En français : « justice »

32,42 J’enivrerai de sang mes flèches, et mon glaive se repaîtra de chair, du sang des mourants et des captifs, du crâne des capitaines ennemis! »

J’enivrerai mes flèches de sang
Du sang de l’ennemi

Et mon épée dévorera de la viande
De leur chair

Du sang du cadavre et de la captivité
Ce châtiment les frappera pour le crime d’avoir versé le sang des dépouilles d’Israël et d’en avoir emmené en captivité

De la tête des brèches de l’ennemi
A cause du péché constitué par le tout début des brèches de l’ennemi [pratiquées sur Israël]. Car le Saint béni soit-Il, lorsqu’il infligera leur punitions aux idolâtres, leur imputera leurs crimes et ceux de leurs pères, et ce à partir de la première des brèches qu’ils ont exécutées sur Israël

32,43 Nations, félicitez son peuple, car Dieu venge le sang de ses serviteurs; il exerce sa vindicte sur ses ennemis, réhabilite et sa terre et son peuple! »

Exultez
En ce temps-là, les idolâtres décerneront des louanges à Israël : « Voyez quel mérite possède ce peuple, qui est resté attaché au Saint béni soit-Il durant toutes les tribulations qu’il a traversées et qui ne L’a pas abandonné ! Ils connaissaient Sa bonté et Ses mérites.

Car Il vengera le sang de ses serviteurs
L’effusion de leur sang, au sens littéral de l’expression

Et Il rendra la vengeance à Ses adversaires
Pour le vol et pour les violences, ainsi qu’il est écrit : « L’Egypte sera une solitude, et Edom un désert délaissé, à cause de la violence sur les fils de Yehouda… » (Yoèl 4,19), et encore : « A cause de ta cruauté à l’égard de ton frère Ya‘aqov… » (‘Ovadia 1, 10)

Sa terre procurera le pardon (wekhipèr) à Son peuple
Il rassérénera Sa terre et Son peuple après les malheurs  les ont frappés et que leur a fait subir l’ennemi. Le mot wekhipèr (« il procurera le pardon ») comporte ici une connotation de « calmer », « apaiser », comme dans : « … j’apaiserai (akhapera) sa face… » (Beréchith 32, 21), que le Targoum Onqelos rend par : « J’apaiserai sa colère »

Sa terre procurera le pardon à Son peuple
Et quelle est Sa terre ? Son peuple. Lorsque Son peuple est consolé, consolée se trouve Sa terre. Dans le même sens : « Tu as rendu, Hachem, ton affection à ton pays… » (Tehilim 85, 2). Et comment l’as-tu fait ? « … Tu as ramené les captifs de Ya‘aqov » (ibid.). Le présent cantique est interprété d’une manière différente [à partir du verset 26] dans le Sifri, où Rabi Yehouda et Rabi Nè‘hèmia sont en désaccord. Rabi Yehouda l’explique intégralement comme s’appliquant à Israël, tandis que Rabi Nè‘hèmia l’explique intégralement comme s’appliquant aux idolâtres. Voici comment Rabi Yehouda l’explique comme s’appliquant à Israël : A partir de : « J’ai dit, je les disperserai » (verset 26) jusqu’à : « et ce n’est pas Hachem qui a fait tout cela » (verset 27), c’est comme je l’ai expliqué. « Car ils sont une nation qui a perdu le conseil… » (verset 28) : Ils ont perdu ma Tora, qui était pour eux de bon conseil. « … Et il n’y a pas en eux d’intelligence » (ibid.), pour comprendre : « … comment un seul [des peuples en] poursuivra mille, si leur rocher ne les avait vendus » (verset 30). A partir de : « Car il n’est pas comme notre rocher, leur rocher… » (verset 31) et jusqu’à la fin, c’est comme je l’ai expliqué. Tandis que Rabi Nè‘hèmia l’explique comme s’appliquant aux idolâtres. A partir de : « Car ils sont une nation qui a perdu le conseil… » (verset 28) et jusqu’à : « … et nos ennemis [sont] juges » (verset 31), c’est comme je l’ai expliqué. [Et ensuite :

Car leur vigne est de la vigne de Sedom(verset 32)
Des idolâtres. Et les terroirs de ‘Amora… Ils ne songent pas à m’attribuer la grandeur. Leurs raisins sont des raisins vénéneux C’est à quoi font allusion les mots : « Si je ne craignais la colère de l’ennemi… » (verset 27) contre Israël pour les étourdir et leur rendre la vie amère. C’est pourquoi : « … leurs grappes sont amères pour eux » (verset 32), pour les en gaver à cause de ce qu’ils ont fait à Ses enfants. Leur vin est un venin de monstres (verset 33) Disponible pour qu’on le leur fasse boire, à cause de ce qu’ils leur ont fait. Caché avec moi (verset 34) Cette coupe même dont il est écrit : « Car une coupe est dans la main de Hachem … [à laquelle boiront tous les méchants de la terre] » (Tehilim 75, 9). Au temps où trébuchera leur pied (verset 35) Ainsi qu’il est écrit : « Les pieds la foulent… [Bavel] » (Yecha’ya 26, 6). Car Hachem jugera Son peuple (verset 36) Selon cette explication-ci, le mot ki s’entend dans le sens de « car » (Roch hachana 3a), et le mot « jugera » ne se réfère pas au prononcé de punitions, mais au soutien qu’Il apportera à leurs luttes contre leurs persécuteurs, quand « Il verra que la main s’en est allée… ». Il dira : Où sont leurs dieux (verset 37) L’ennemi dira : « Où est le Eloqim d’Israël ? », comme l’a demandé Titus l’impie quand il a déchiré le voile, ainsi qu’il est écrit : « Mon ennemie le verra et sera couverte de honte, elle qui me dit : “Où est Hachem, ton Eloqim ? ” » (Mikha 7, 10). Voyez maintenant que moi… (verset 39) C’est alors que le Saint béni soit-Il manifestera Son secours et dira : « “Voyez maintenant que moi, je le suis”, c’est depuis chez moi que s’est abattu sur vous le malheur, et c’est depuis chez moi que vous adviendra le bonheur. » Et il n’y a personne qui délivre de ma main (ibid.) Personne qui puisse vous sauver du malheur que je ferai s’abattre sur vous. Car je lèverai vers le ciel ma main (verset 40) Comme s’il était écrit : « je lève constamment ». Comme le rend le Targoum Onqelos : « Je fais résider au ciel le lieu de ma chekhina. » Même lorsque le faible occupe une position élevée et le puissant une position inférieure, celui qui est élevé inspire de la crainte à celui qui est en dessous. Il en est ainsi, à plus forte raison, lorsque c’est le puissant qui occupe une position élevée et le faible une position inférieure. Ma main (ibid.) L’emplacement de ma chekhina, comme dans : « chaque homme à son côté (littéralement : « sur sa main ») » (Bamidbar 2, 17 – voir Rachi ibid.). Il aurait été en mon pouvoir de vous punir, mais j’ai dit que « je suis vivant à jamais » : Je ne me hâte pas de punir, car j’ai le temps puisque « je suis vivant à jamais ». C’est aux générations ultimes que je réclamerai des comptes, et il m’est possible de « me payer » sur les morts comme sur les vivants. Un roi de chair et de sang, lorsqu’il est sur le point de mourir, se hâte d’exercer sa vengeance [encore] de son vivant, car peut-être mourra-t-il, lui-même ou son ennemi, et n’assistera-t-il pas à sa vengeance. Tandis que moi, « je suis vivant à jamais », et donc si je ne les punis pas de leur vivant, je le ferai après leur mort. Lorsque (im) j’aiguise l’éclair de mon épée (verset 41) Il est fréquent que le mot im n’exprime pas une condition : « Lorsque j’aiguiserai l’éclair de mon épée et que ma main saisira le jugement… », comme je l’ai expliqué plus haut

32,44 Moïse vint faire entendre au peuple toutes les paroles de ce cantique, lui avec Hoschéa, fils de Noun.

Lui et Hoché‘a
Ce chabath a été celui « de la paire » (Sota 13b). Le pouvoir a été retiré à l’un et conféré à l’autre. Mochè a donné à Yehochou‘a un porte-parole pour qu’il donne un enseignement [encore] de son vivant, afin qu’Israël ne dise pas : « Tu n’osais pas, du vivant de ton maître, élever la tête ! » Et pourquoi le texte l’appelle-t-il ici « Hoché‘a » ? Pour signaler que son esprit ne s’est pas enorgueilli et que, malgré la grandeur qui lui a été conférée, il est resté aussi humble que par le passé

32,45 Lorsque Moïse eut achevé d’adresser toutes ces paroles à Israël entier,

32,46 il leur dit: « Prenez à cœur toutes les paroles par lesquelles je vous admoneste en ce jour, et que vous devez recommander à vos enfants pour qu’ils observent avec soin toutes les paroles de cette doctrine.

Appliquez votre cœur
On doit appliquer ses yeux, ses oreilles et son cœur à l’étude de la Tora. C’est ainsi qu’il est écrit : « Fils de l’homme ! Regarde de te yeux, écoute de tes oreilles et applique ton cœur, etc. » (Ye‘hezqèl 40, 4). On peut appliquer ici un raisonnement a fortiori : Si le plan du Temple, qui est [pourtant] perceptible à l’œil et mesurable au moyen d’une règle, exige pour être intelligible toute l’attention des yeux, des oreilles et du cœur de l’homme, à plus forte raison l’exigent-elles les paroles de Tora, qui sont comme « des montagnes suspendues à un cheveu » (‘Haguiga 10a et b)

32,47 Car ce n’est pas pour vous chose indifférente, c’est votre existence même! Et c’est par ce moyen seul que vous obtiendrez de longs jours sur cette terre, pour la possession de laquelle vous allez passer le Jourdain. »

Car ce n’est pas une parole vide de vous
Ce n’est pas en vain que vous vous exténuez sur elle, étant donné qu’une grande récompense lui est attachée, « car elle est votre vie ». Autre explication : Il n’y a pas de chose « vide » dans la Tora qui, pour peu que tu l’étudies, ne te procure un profit. J’en citerai pour preuve l’enseignement suivant des Sages : « Et la sœur de Lotan : Timna’ » (Beréchith 36, 22) – « Et Timna’ était concubine de Elifaz… » (Beréchith 36, 12). Elle s’est dit : « Je ne mérite pas de devenir sa femme ! Si seulement je pouvais devenir sa concubine ! » Et pourquoi tout cela ? Pour faire l’éloge d’Avraham, à la descendance duquel les princes et les rois aspiraient à s’unir

32,48 L’Éternel parla à Moïse, ce même jour, en ces termes:

Hachem parla à Mochè
On trouve à trois reprises l’expression : « en ce jour-là même ». Elle est employée à propos de Noa‘h : « “En ce jour-là même” vint Noa‘h… » (Beréchith 7, 13), c’est-à-dire en pleine clarté du jour. Car les gens de sa génération s’étaient dit : « Si nous remarquons quoi que ce soit, nous ne le laisserons pas entrer dans l’arche. Bien au contraire, nous prendrons des haches et des cognées et nous la détruirons. » Le Saint béni soit-Il a dit : « Je vais le faire entrer en plein jour, et vienne l’empêcher quiconque a les moyens de le faire ! » L’expression est également employée à propos de l’Égypte : « Ce fut “en ce jour-là même” que Hachem fit sortir les fils d’Israël… » (Chemoth 12, 51). Car les Égyptiens s’étaient dit : « Si nous remarquons quoi que ce soit, nous ne les laisserons pas partir. Bien au contraire, nous prendrons des épées et des armes et nous les massacrerons ! » Le Saint béni soit-Il a dit : « Je vais les faire sortir en plein jour, et vienne les empêcher quiconque a les moyens de le faire ! » De même est-il écrit ici, à propos de la mort de Mochè : « en ce jour-là même ». Car Israël s’était dit : « Si nous remarquons quoi que ce soit, nous ne le laisserons pas [nous abandonner], lui qui nous a fait sortir d’Égypte, qui a fendu pour nous la mer, qui a fait tomber pour nous la manne, qui nous a procuré les cailles, qui a fait monter pour nous le puits et qui nous a donné la Tora ! Nous ne le laisserons pas ! » Le Saint béni soit-Il a dit : « Je vais le faire entrer en plein jour, etc.

32,49 « Monte sur cette cime des Abarîm, sur le mont Nébo, situé dans le pays de Moab en face de Jéricho, et contemple le pays de Canaan, que je donne aux enfants d’Israël en propriété;

32,50 puis meurs sur la montagne où tu vas monter, et rejoins tes pères, de même que ton frère Aaron est mort à Hor-la-Montagne et est allé rejoindre ses pères.

Comme est mort Aharon
De cette même mort que tu as vue et dont tu as souhaité [qu’elle soit la même pour toi]. Mochè avait retiré à Aharon son premier vêtement et en avait revêtu El‘azar, puis le deuxième, puis le troisième, de sorte qu’il a pu voir son fils dans sa splendeur. Mochè lui a alors dit : « Aharon mon frère ! Monte sur le lit ! » Et il est monté. « Etends tes mains ! » Et il les a étendues. « Etends tes pieds ! » Et il les a étendus. « Ferme les yeux ! » Et il les a fermés et s’en est allé… Mochè s’est alors dit : « Heureux celui qui meurt d’une telle mort !

32,51 Parce que vous avez été fautifs envers moi au milieu des enfants d’Israël, à l’occasion des eaux de Meriba à Kadêch, dans le désert de Cîn, en ne me sanctifiant pas au milieu des enfants d’Israël.

Parce que vous avez été infidèles envers moi
Vous avez été la cause d’une infidélité envers moi

Parce que vous ne m’avez pas sanctifié
Vous avez été la cause que je n’ai pas été sanctifié. Je vous avais dit : « Vous parlerez au rocher… » (Bamidbar 20, 8), et eux l’ont frappé et ce à deux reprises. Car s’ils lui avaient parlé et qu’il eût donné de l’eau sans avoir été frappé, le nom de Hachem s’en serait trouvé sanctifié, car Israël aurait dit : « Si ce rocher, qui est indifférent à [toute perspective] de récompense et de punition, qui n’attend aucune récompense de son obéissance ni aucune punition d’une faute, obéit [pourtant] à l’ordre de son Créateur, à plus forte raison sommes-nous tenus [à cette obéissance].

32,52 Ce n’est qu’à distance que tu verras le pays: mais tu n’y entreras point, dans ce pays que je donne aux enfants d’Israël. »

Car en face
De loin

Tu verras…
Si tu ne le vois pas maintenant, tu ne le verras plus de ton vivant

Mais tu n’y viendras pas
Car je sais qu’il t’est cher. C’est pourquoi je te dis : « Monte… et regarde !