Soukkot

L’origine de la fête

The Israel Museum. A sukkah. .

 

La fête de Soukkot (en hébreu : cabanes ou tentes)  a une origine biblique. Se situant au seuil de l’année nouvelle, au temps des vendanges, elle consiste d’une part à rendre grâce pour les récoltes et les bénédictions accordées par Dieu durant l’année écoulée, d’autre part à faire mémoire de la longue traversée du désert pendant laquelle le peuple hébreu a dû vivre sous la seule protection de Dieu, avec la manne pour nourriture et des tentes pour abri.

Les sources bibliques

Soukkot est  la troisième et dernière fête de pèlerinage prescrite par Dieu à Moïse :
« Le quinze du septième mois, après avoir récolté les produits de la terre, vous irez en pèlerinage fêter le Seigneur pendant sept jours ; le premier jour sera jour de repos, le huitième jour sera jour de repos ; le premier jour, vous vous munirez de beaux fruits, de feuilles de palmiers, de rameaux d’arbres touffus ou de saules des torrents, et vous serez dans la joie pendant sept jours devant le Seigneur votre Dieu. Vous ferez ce pèlerinage pour fêter le Seigneur, sept jours par an ; c’est une loi immuable pour vous d’âge en âge : le septième mois, vous ferez ce pèlerinage, vous habiterez sous la tente pendant sept jours ; tout indigène en Israël doit habiter sous la tente pour que d’âge en âge vous sachiez que j’ai fait habiter sous la tente les fils d’Israël, lorsque je les ai fait sortir du pays d’Égypte. C’est moi le Seigneur, votre Dieu. » (Lev 23, 39-43 ou Dt 16, 13).

La célébration de la fête

A l’époque du Temple, Soukkot était vraiment la fête par excellence. Le traité Soukka de la Mishna décrit en détail les rites que l’on accomplissait alors : la construction de cabanes pour rappeler les tentes du désert et, au Temple, le sacrifice de soixante-dix taureaux pour symboliser les soixante-dix nations du monde, Israël associant  toute l’humanité  à sa prière de louange.

Ces rites s’accompagnaient de nombreuses libations d’eau, facilitées par la proximité de la source de Siloé. Il y avait aussi de nombreuses processions, chants et danses qui marquaient le caractère joyeux de ces sept jours de fête.

Aujourd’hui, chaque famille construit une soukka, une cabane, dans son jardin ou sur sa terrasse. Cette cabane, dans laquelle on prend les repas festifs,  sert de demeure provisoire. Elle doit être couverte de branchages de façon à laisser voir le ciel et les étoiles, pour signifier que l’on a conscience de la précarité de la condition humaine, mais confiance en Dieu.

Enfant tenant le cedrat et le loulav de soukkot.

Le choix d’un loulav est la seconde prescription. Le loulav est un bouquet composé de quatre espèces : une branche de palmier, trois rameaux de myrte et deux rameaux de saule, ainsi qu’un cédrat. C’est le symbole de la diversité et  de l’unité du peuple juif.

On se rend à la synagogue avec son loulav. Au cours des offices, les rouleaux de la Tora sont sortis de l’Arche sainte et les fidèles partent en procession autour de l’estrade de lecture ou de la synagogue, en suppliant Dieu de donner son salut (en hébreu : hosha-na). Ils agitent leur loulav dans les six directions de l’espace, les quatre points cardinaux, le haut et le bas, pour que vienne le Messie et que le salut de Dieu s’étende à tout l’univers.

A la fin de la fête, la prière pour la pluie rappelle les libations d’eau faites au Temple  dans l’allégresse.

Dans le calendrier liturgique, Soukkot s’inscrit après les « jours redoutables » (entre Roch HaChana et Yom Kippour) et, selon la tradition populaire, le jugement prononcé par Dieu à Roch HaChana et scellé à Kippour n’entre en vigueur que le septième jour de Soukkot. Voilà pourquoi ce jour comporte un rite appelé Hoshana rabba qui consiste à faire sept fois (au lieu d’une) le tour de la synagogue.

Fête de Souccot chez les Premishlan, un courant hassidique.Simchat Tora, le huitième jour de Souccot. Le rabbin danse avec la tora.

La lecture du quatorzième et dernier chapitre du prophète Zacharie (Za 14, 16-29)  ouvre sur la fin des temps, sur le jour où  l’humanité entière reconnaîtra la souveraineté du seul Dieu, ce qui donne à Soukkot un caractère eschatologique.

La joie éclate particulièrement le dernier jour de la fête, nommé Simhat Tora (jour de la joie de la Tora). En diaspora, au huitième jour, appelé Shemini atseret, on termine la lecture du Deutéronome (Dt 33-27 à 34-12) pour recommencer celle du Livre de la Genèse (Gn 1,1 à 2,3) car la Parole de Dieu doit être lue et méditée sans fin.

Soukkot dans le Nouveau Testament

Il n’existe pas de fête analogue à Soukkot dans la liturgie chrétienne, comme il en existe pour Pessah (Pâques) et pour Shavouot (Pentecôte). Pourtant, plusieurs textes évangéliques évoquent expressément  cette fête.

L’allusion est transparente dans la scène de la Transfiguration de Jésus, rapportée par Matthieu et Marc. Les tentes que l’apôtre Pierre propose de dresser ne peuvent être que des soukkot, habitées de la présence de Dieu :

Fresco in Holy cross church; Pedoulas. Transfiguration.

« Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmène à l’écart, sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière. Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui. Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » Mt 17, 1-9
« Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. Élie leur apparut avec Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus. Pierre alors prend la parole et dit à Jésus : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie ». Mc 9, 2-10.

Selon la plupart des exégètes, la précision de date donnée par les deux évangélistes (« six jours après ») permet justement de situer l’événement à Soukkot.

Entry of Christ into Jerusalem. St. Peter and Paul Cathedral.

Quand Matthieu dépeint l’entrée de Jésus à Jérusalem, il met en scène une foule agitant des rameaux et les étendant sur son passage au cri de » Hosha-na, béni soit au nom du Seigneur celui qui vient ».Mt 21, 8-9″.
Là encore, il est difficile de ne pas penser à la liturgie de Soukkot, à cette différence près que, chez Matthieu, le cri devient acclamation de celui qui vient inaugurer l’ère messianique.

C’est  dans l’Évangile de Jean que l’on voit Jésus lui-même prendre part à la fête de Soukkot. On lit en effet en Jn 7, 37-38 : « Le dernier jour de la fête, qui est aussi le plus solennel, Jésus, debout, se mit à proclamer : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et que boive celui qui croit en moi. Comme l’a dit l’Écriture : De son sein couleront des fleuves d’eau vive. »

Et quelle est cette eau vive sinon l’Esprit Saint annoncé par les prophètes ?

Dans l’Apocalypse enfin, l’image des palmes de Soukkot est reprise dans la vision de la foule immense des élus se tenant devant le trône de Dieu. C’est désormais sous la tente même de Dieu qu’ils sont introduits: «  Après cela, j’ai vu : et voici une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main. Et ils s’écriaient d’une voix forte : « Le salut appartient à notre Dieu qui siège sur le Trône et à l’Agneau ! »
« C’est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu, et le servent, jour et nuit, dans son sanctuaire. Celui qui siège sur le Trône établira sa demeure chez eux. Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif, ni le soleil ni la chaleur ne les accablera, puisque l’Agneau qui se tient au milieu du Trône sera leur pasteur pour les conduire aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. » Ap 7, 9-10 ; 15-17