Obsèques de Jean Guéguinou
Obsèques de Jean Guéguinou |
Après les nombreux hommages qui ont été rendus dans la presse nationale à l’ambassadeur de France, Jean Gueguinou, ses obsèques se sont déroulées ce 1er juillet, à Saint Honoré d’Eylau, sa paroisse. Ce lieu était aussi celui de la célébration, avec l’ambassade d’Israël, des 25 ans de la signature de l’Accord fondamental au succès duquel quel il avait largement contribué. Nous vous proposons de lire l’homélie de frère Louis-Marie, venu spécialement de Jérusalem témoigner de la reconnaissance des congrégations françaises en Israël à l’ancien Consul général de France à Jérusalem. |
L’homélie de frère Louis-Marie
Évangile de St Luc, chap24, 13-35.
« Deux hommes tournent le dos à Jérusalem et s’en vont tristes, leurs espérances ont été déçues ! ils s’étaient mis en route à la suite de ce maître prometteur, Jésus de Nazareth et voici qu’il a péri, exécuté comme un malfaiteur. Ils sont dans le doute. Mais leur cheminement va les conduire de l’incompréhension et l’affliction à l’intelligence du cœur et la joie de l’espérance.
Cet évangile comptait particulièrement pour notre ami Jean à cause du cheminement spirituel qu’il représente et parce qu’il est l’évangile du lieu d’Abu Gosh qui lui était si cher. Un évangile qui nous déplace de nos espérances humaines et terrestres à la perspective de la vie éternelle, qui nous met face au sens de nos vies. Mais cette perspective d’éternité est profondément enracinée dans la qualité des relations humaines. Or n’est-ce pas le plus important dans nos vies ? Quels sont nos regards, nos liens avec l’autre, les autres ? St Jean de la croix le rappelle bien : c’est sur l’amour que nous serons jugés. L’affliction des deux disciples tenait à cette qualité de relation avec Jésus et c’est ensemble qu’ils cheminent, essayant de se consoler. Douleur de tout compagnonnage rompu et douceur de la consolation apportée par les amis. Mais ils ne sont pas enfermés sur eux-mêmes1yr sur leur douleur et ils accueillent ce voyageur qu’ils croisent sur la route et l’invite à demeurer avec eux.
Jean a toujours vécu cette attention à autrui ! dans sa fidélité dans l’amitié, dans son regard attentif à tous des plus grands au plus modestes, jusque dans les moindres détails. Un regard bienveillant mais lucide, un regard de bénédiction, bénédiction qui participe de la bénédiction de Dieu même et Dieu ne peut pas refuser sa bénédiction à ceux qui vivent avec droiture ce qu’ils sont et Dieu seul connaît le coeur de l’homme. Il était important pour lui de tout mettre sous ce regard de Dieu. Comme nous l’entendront tout à l’heure : « Ubi caritas et amor, Deus ibi est ».
Il avait été profondément marqué par sa fréquentation de la Basilique de Montmartre sous le règne de Mgr Charles. Et il fût particulièrement heureux de lui remettre les insignes de la Légion d’honneur à Jérusalem, lorsqu’il y était Consul Général à Jérusalem un lieu où le sabre et le goupillon font toujours bon ménage. Si sa foi et sa formation chrétienne l’ont façonné il a toujours respecté strictement la neutralité républicaine dans son service de l’État.
Attention aux autres, écoute et dialogue comme ces deux disciples sur la route, ainsi était Jean et nombreux sont ceux qui aujourd’hui peuvent témoigner qu’ils sont là où ils se trouvent grâce à la présence de Jean. Comme on a pu le lire dans la presse : « Il était de ces êtres dont l’empreinte qu’ils déposent en ceux qui les côtoyèrent ne s’effacent pas ».
Le cœur des disciples s’ouvrent à la compréhension des Écritures, de l’histoire du salut et à la reconnaissance de Jésus ressuscité. C’était lui et nous ne le savions pas. Combien de fois dans une vie pouvons-nous reconnaître la présence de Dieu mais nous sommes libres de l’interpréter et de la nommer : Hasard, Chance ou providence. C’est en ce point précis que se situe la liberté de la foi. Rien n’est imposé, tout est donné à chacun de l’accueillir. A partir de ce point se crée une relation personnelle qui implique attitude éthique et témoignage. Nous ne sommes pas dans la conformité à un règlement interne mais dans une liberté de vie en adéquation à la relation établie avec le Christ ressuscité.
Ce témoignage de chrétien, Jean l’a donné, sans le brandir comme un étendard mais dans la discrétion d’un engagement constant, sans faille dans l’Église et certaines de ses institutions, privilégiant toujours la droiture, l’honnêteté et la défense de l’honneur des hommes, au-delà des jeux institutionnels. Cet engagement trouva son terreau d’épanouissement dans la Terre sainte. Déjà marqué par son pèlerinage avec Mgr Charles, Jérusalem fut le premier poste qu’il dirigea et le lieu où il revint régulièrement.
Son action pour l’Église se concentra donc sur la Terre sainte et ses chrétiens, ses communautés françaises. Quoi de plus normal ? Comme le rappelait l’évangile tout s’enracine en ces lieux, en cette Terre de la promesse. « Partant de Moïse et de tous les prophètes Et il se montra toujours attentif aux liens avec le monde juif, où il développa de belles amitiés, permettant des rencontres inattendues dans ce monde composite de Jérusalem. Enracinement particulier qui connut un épanouissement universel lorsqu’il trouva naturellement sa place comme ambassadeur auprès du st Siège.
Au fond Jean, d’une certaine façon n’a jamais quitté Jérusalem. Il vient de la quitter pour rejoindre la Jérusalem céleste, que la première lecture nous a décrite, ce lieu où toute chose est nouvelle, promesse d’un héritage : « Je serai son Dieu, et lui sera mon fils. »
Et n’est-il pas frappant que le dernier voyage terrestre de ce grand globe-trotter qu’était Jean fut pour Jérusalem. La boucle était bouclée de Jérusalem à Jérusalem !
Et voici le dernier texte de prière que Jean entendit à l’hôpital : -une prière du frère Roger de Taizé-: « Jésus le Christ dans ton évangile tu nous en assures : je ne vous laisserais jamais seul, je vous enverrai l’Esprit saint; il sera un soutien et un consolateur, il vous donnera d’être en communion avec Dieu, jour après jour.»
Tu n’as jamais été seul, Jean, puisses-tu aujourd’hui entrer dans cette communion éternelle et ceux qui te pleurent recevoir toute consolation dans la lumière du Christ ressuscité qui vient nous rejoindre sur chacune de nos routes. »
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